10 Janvier 2017
Un film documentaire écrit par Lise Barnéoud et Lorène Debaisieux à découvrir ce mardi en première partie de soirée sur France 5 : Devenir il ou elle.
Cinq adolescents transgenres racontent la bataille acharnée qu’ils mènent pour se sentir eux-mêmes et être reconnus dans leur identité. Léna, Lucas, Eléna, Bas et Connor en ont la certitude depuis leur plus jeune âge : ils ne sont pas nés avec le bon sexe dans le bon corps. « Il y a eu une erreur d’attribution », disent-ils. Ce sentiment de ne pas être eux-mêmes les enferme dans une adolescence pavée de souffrances. Entre rejet familial et errance médicale, leur parcours révèle leur combat pour trouver une issue à leur mal-être.
Aux Pays-Bas, ce mal être est pris en charge très tôt. Grâce à un accompagnement médical adapté, ces jeunes peuvent entamer dès 12 ans leur transition. Entourés par des associations, ils sont également soutenus dans le milieu scolaire. En France, le retard est flagrant, mais des structures spécialisées pour les jeunes transgenres se mettent timidement en place à Paris. L’objectif n’est plus de faire disparaître cette dysphorie mais d'accompagner ces jeunes dans leur démarche et de prendre en charge leur souffrance.
Filmés dans leur vie quotidienne, dans leur environnement familial, lors des consultations à l’hôpital et au fil d’entretiens avec les associations et les médecins qui les accompagnent, Lucas, Elena, Léna, Bas et Connor invitent à porter un nouveau regard sur la construction de l’identité masculine et féminine…
A travers leurs témoignages s’esquisse une nouvelle génération d’adolescents transgenres qui parvient à affirmer plus tôt leur identité. Leur transition est difficile mais plus impossible, facilitée par le Web, l’échange d’expériences... Leur parcours et leurs projets autorisent l’espoir de les voir s’intégrer comme n’importe quel autre jeune dans notre société, contrairement à la plupart de leurs aînés, trop souvent stigmatisés et marginalisés.
Léna, 17 ans, France
Léna vit dans la région parisienne. « Dès mes 6-7 ans, je savais que j’étais différent des autres garçons mais je ne comprenais pas vraiment ce qui m’arrivait ». Elle n’ose rien dire à ses parents jusqu’aux années collège où la puberté la fait entrer dans une grande souffrance. Elle commence à faire des recherches sur Internet et se reconnait dans les témoignages des filles transgenres. C’est par l’intermédiaire d’une lettre qu’elle l’annonce à ses parents. « Elle nous a expliqué que depuis qu'elle est enfant, elle s'est toujours sentie fille, dans un corps de garçon… comme si il y avait eu une erreur de genre dès la conception », raconte sa mère. Mais son père ne parvient pas à accepter cette décision, il continue d’utiliser prénom et pronom masculins. Malgré tout, Léna débute des consultations à la Fondation Vallée, un centre hospitalier public de psychiatrie pour enfants et adolescents. Depuis janvier 2015, en coopération avec les hôpitaux de la Pitié-Salpetrière et Robert Debré, ce centre propose des consultations spécialisées à destination des jeunes transgenres. Léna sera l’une des premières patientes de cette équipe transdisciplinaire à bénéficier du traitement de bloqueurs de puberté.
Lucas, 15 ans, France
Ses amis l’appellent Lucas mais aux yeux de ses parents, il est toujours Lina. Ils n’ont pas le réflexe. Son parcours, Lucas le raconte encore entre deux genres : « En 6e, je me dis que j’ai un problème et je pense donc à l’homosexualité. Je suis attiré par les filles mais je ne me sentais pas dans un corps de fille ». A cette époque, Lucas est devenu agressif à la maison comme au collège. Il commence à se faire des scarifications sur un corps qu’il déteste. « Pour se punir à l’arrivée de la puberté », explique-t-il. Au lycée, l’infirmière décide de convoquer les parents car elle découvre les automutilations de l’élève. Petit à petit, avec l’aide d’un psychiatre, Lucas parvient à mettre des mots sur son mal être. Ses parents l’écoutent, puis décident de l’accompagner dans sa démarche. La décision n’est pas facile, expliquent les parents, « quand ils sont petits, on s'imagine des choses de leur futur qui ne sera plus », exprime son père. Après une longue errance médicale, la famille consulte le Dr Chambry (Fondation Vallée), qui fait partie d’une équipe pluridisciplinaire créée en janvier 2015 dont l’objectif est d’accompagner les jeunes transgenres. Ils finiront finalement par préférer le privé, qui offre des délais d’attente beaucoup moins long.
Eléna, 18 ans, France
Eléna vit dans la Meurthe-Et-Moselle. A 17 ans, après une adolescence difficile, elle annonce à ses parents sa transidentité. Ils décident alors de la faire interner en hôpital psychiatrique. Eléna fugue en plein hiver. « Je voulais me laisser mourir dans la neige. J’en avais marre, je ne voyais pas de solution », retrace-t-elle. C’est l’association l’Hêtre, une association d’aide aux jeunes gays, lesbiennes et trans, qui lui permet de se relever en lui offrant notamment une place dans son centre d’hébergement d’urgence. Dès sa majorité, elle commence ses démarches de transition et sa prise d’hormone. « Je me sens libérée, j’ai l’impression d’être enfin moi-même, de pouvoir être honnête à 100%, de ne pas cacher tout le temps qui je suis, et ça fait du bien ». Aujourd’hui, elle ne voit plus sa famille et partage sa vie avec Lionel, son amoureux.
Connor, 17 ans, Pays-Bas
Connor vit à Zeriekzee, au sud des Pays-Bas. Né fille, il s’est toujours senti mal dans sa peau et son mal-être s’est encore accru lors de sa puberté. Un jour, il s’est tailladé les veines. « J’ai d’abord pensé que ma fille était homosexuelle, mais quelque mois plus tard, elle m’a expliqué que c’était autre chose », raconte sa mère. En 2015, Connor fait son coming-out sur Facebook et trouve son nouveau prénom sur Youtube. Il profite de l’été pour se couper les cheveux, changer sa garde robe, acheter des Binders pour cacher sa poitrine. En septembre 2015, il fait sa rentrée au collège en tant que garçon et explique sa situation à ses camarades, avec l’appui de l’équipe enseignante et d’une association. Dans la foulée, il commence ses consultations dans un centre spécialisé sur la dysphorie de genre à Leiden, où il sera accepté dans le protocole en avril 2016.
Bas, 15 ans, Pays-Bas
A six ans, Bas demandait déjà s’il pourrait devenir un garçon, faire pipi debout. « Je pensais que ça lui passerait, qu’elle oublierait avec le temps, mais cela s’est accentué », raconte Michel, son père. Bas devenait de plus en plus irritable, entrait dans des crises de colère et d’angoisse. A huit ans, Bas et ses parents consultent un psychologue qui parle pour la première fois de dysphorie de genre. Il conseille une consultation au centre spécialisé de l’hôpital d’Amsterdam. Un an plus tard, le diagnostic de dysphorie de genre est posé. « Au début, c’était comme si je perdais ma fille, se souvient Michel. Mais j’ai compris au final que c’était toujours le même enfant. J’ai surtout remarqué que Bas allait beaucoup mieux et que la famille retrouvait une tranquillité ». Bas, qui passait déjà pour un garçon auprès des inconnus, se fait aider par l’association Transvisie pour expliquer à son école primaire sa transition. « L’un des plus beaux jours de ma vie », précise-t-il. Puis il débute le traitement pour bloquer sa puberté dès 11 ans. Lorsqu’il entre au collège l’année suivante, c’est un garçon aux yeux de tous.
Crédit photo Lucas © Morgane Production.
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