15 Avril 2024
Ce lundi 15 avril, en première partie de soirée sur France 5, Hugo Clément révèle - dans un nouveau numéro de Sur le front - la face cachée de notre production intensive de fromage en France et nous explique pourquoi nos différents fromages perdent leur authenticité.
Parmi les reportages proposés :
Saviez-vous que les chèvres ne produisaient pas de lait en hiver ? Pour qu’on propose encore des fromages de chèvre frais dans les supermarchés à Noël, les éleveurs ont trouvé une solution ; les chèvres sont enfermées et éclairées pour leur faire croire que les jours sont plus longs, comme en plein été. Comme cela, elles produisent du lait hors saison...
Dans les élevages de chèvres, les petits mâles ont très peu de valeur, comme ils ne produiront jamais de lait. Il existe peu de débouchés pour eux. Les chevreaux sont abattus à l’âge d’un mois et sont souvent exportés et consommés à l’étranger. En France, la filière essaye tant bien que mal de nous faire manger du chevreau et promeut des kebabs, des hot-dogs et des burgers de chevreaux ! Vous entendrez un éleveur qui a révélé que, par le passé, il tuait ses chevreaux à la naissance tellement ils se vendent peu cher : deux euros pour un chevreau. C’est interdit mais il assure que la pratique existe bel et bien chez les éleveurs en France.
Un salarié d'une chaîne de restaurants révèle que quand on commande une côte de bœuf, on nous sert souvent un morceau de vache laitière ! Même chose quand on achète de la viande bovine au supermarché. Les vaches laitières sont envoyées à l’abattoir de plus en plus jeunes, à 6 ans en moyenne, notamment parce qu’elles ne produisent plus assez de lait pour les besoins de l’industrie.
De plus en plus de vaches laitières sont enfermées en permanence et n’ont plus aucun accès à l’extérieur. Elles ne broutent jamais l’herbe de leur région. Il y a dix ans, environ 110.000 vaches vivaient enfermées comme cela, aujourd’hui elles sont plus de 140.000 !
Avant, chaque sorte de fromage ou presque était liée à une race de vache laitière : c’est ce qui donnait un goût spécifique à chacun. Pour produire plus, beaucoup d’éleveurs, encouragés par l’État, se sont tournés vers des races plus productives. À tel point que certaines races françaises sont au bord de l’extinction. La vache Casta, par exemple, produisait historiquement le lait pour le fromage bethmale. Il n’en reste plus que 400 aujourd’hui en France… L’institut de l’élevage a dû mettre en place un plan de soutien pour qu’elle ne disparaisse pas complètement. En plus, quand on change de race de vache, le fromage n’a plus le même goût !
Les truites des rivières de la région de l’AOP Comté disparaissent depuis quinze ans, notamment à cause d’un champignon. La qualité de l’eau s’est dégradée : les rivières sont polluées en partie par la production de comté, qui a plus que doublé en trente ans ! Selon les militants locaux, il y a désormais trop de vaches dans le secteur et les épandages de lisiers sont devenus trop fréquents, ce qui pollue les nappes phréatiques et les cours d’eau.
Hugo Clément :
"Ça n'a jamais surpris personne de voir un chèvre frais sur le plateau de fromages du repas de Noël. Pourtant, ça n’a rien de naturel : les chèvres ne produisent pas de lait en hiver, normalement. J’ai voulu savoir comment c’était possible. J’ai découvert qu’on les enfermait sous des néons pour leur faire croire que les jours sont plus longs, comme en été, et qu’elles produisent du lait, même en plein hiver.
À partir de cet exemple ahurissant, j’ai voulu comprendre à quel point on avait industrialisé la production de nos fromages, auxquels nous sommes si attachés. C’est vrai que, personnellement, j’adore le fromage. Et, en France, nous sommes très fiers de nos « 365 fromages, un différent pour chaque jour de l’année ». Quand on voit comment ils sont fabriqués, on s’aperçoit que souvent on a remplacé les races traditionnelles par des vaches Prim’Holstein, hyper productives.
Nous avons aussi enfermé nos vaches laitières : elles sont de plus en plus nombreuses à vivre à l’intérieur toute leur vie et à être nourries à l’ensilage (du maïs ou de l’herbe fermentés). Elles ne s’alimentent plus avec l’herbe des prairies. Bien sûr, quand on fait du fromage avec les mêmes vaches qui mangent les mêmes aliments, le goût finit par s’homogénéiser ! C’est d’ailleurs l’ensilage qui donne cette acidité à nos fromages. Le goût des terroirs s’estompe puisque de nombreux fromages que l’on connaît tous sont produits avec le même lait, comme le camembert, le munster, le cantal…
Nous avons aussi découvert des pratiques beaucoup plus condamnables, comme le sort réservé aux jeunes mâles. Les chevreaux par exemple : il existe très peu de débouchés pour eux. Nous avons appris que certains éleveurs les abattent à la naissance, alors que c’est interdit. Un agriculteur nous affirme que ces bébés se vendent… deux euros à peine. Nous ne sommes pas les seuls à être choqués par toutes ces pratiques bien loin des savoir-faire traditionnels. Des crémeries réagissent et ne vendent plus de fromage de chèvre frais hors saison, pour lutter contre l’éclairage des chèvres en hiver ! Les éleveurs eux aussi se battent pour faire revivre les races d’autrefois. Ils nourrissent leur cheptel avec du foin l’hiver et les laissent pâturer l’été. Ils délaissent des pratiques industrielles pour retrouver le goût du terroir."
Crédit photos © Winter Productions.
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