Anne Sinclair se raconte dans le livre Passé composé.

380 pages et environ 22.50 euros pour l'autobiographie de la talentueuse journaliste Anne Sinclair. Passé composé, édité par Grasset, est attendu le 2 juin prochain dans les librairies.

« Je me suis longtemps refusée à imiter les confrères qui publient leurs Mémoires, persuadés que leur moi mérite exhibition et que les épisodes de leur vie personnelle et professionnelle suscite l’intérêt. Le journalisme est un métier comme un autre et la télévision n’est souvent qu’une usine à baudruches. A tous ceux qui m’interrogeaient à ce sujet, je n’ai cessé de déclarer qu’à ce petit jeu narcissique, on ne me prendrait pas. Publier cet ouvrage m’oblige à manger mon chapeau. Me voici à mon tour piégée dans ce paradoxe : écrire comme tout le monde, en espérant intéresser tout le monde à une vie qui ne serait pas celle de tout le monde. Il faut assumer ses contradictions et ne pas avoir peur de se désavouer. C’est dit… Les personnes que je croise me regardent comme une vieille connaissance à laquelle elles associent deux images contradictoires : la présentatrice d’une émission qui fut célèbre il y a plus de vingt ans et qui demeure dans la mémoire collective ; la femme qui fit, à son corps défendant, des milliers de « une » de journaux à l’occasion d’un scandale planétaire impliquant son mari. N’étant pas seulement l’une et ne me reconnaissant pas dans l’autre, je me demande ce qui, de tout cela, peut rester pertinent. Je vais tenter d’être juste. Pas exhaustive mais sincère. Je parlerai de mes parents, de cette enfance très protégée qui aurait pu mettre hors de ma portée les armes nécessaires pour lutter dans la vie ; je convoquerai certains personnages hauts en couleur que j’ai eu la chance de croiser et tenterai de brosser le portrait le plus fidèle possible du monde des médias tel que je l’ai connu ; j’évoquerai les grands bonheurs de la vie et les épreuves qui l’ont écorchée… »

Le début du livre :

Il fut, des années durant, le personnage principal de ma vie. Il était beau, il était tendre, il était drôle et a longtemps – bien plus longtemps que l’Œdipe ne le suppose généralement – incarné l’Homme. Je l’appelais « P’pa ». J’éprouvais pour lui un immense amour. Il me le rendait bien et me donnait l’impression d’être la personne la plus importante à ses yeux.

J’avais trente ans, et lui juste soixante-dix quand il disparut, le 21 janvier 1980, jour anniversaire de la mort de Louis XVI. J’y pensais fugitivement ce jour-là au milieu de mon chagrin, tant cette date m’avait marquée enfant, un matin, en classe de 6e, quand une camarade, issue d’une noble lignée, était venue habillée de noir en souvenir de l’échafaud fatal. À onze ans !

Mes parents décrétèrent dès ma naissance que j’étais la huitième merveille du monde. Ils m’appelaient la Toute-Petite. J’ai deux ans : la Toute-Petite est formidable. J’ai dix ans : la Toute-Petite l’est toujours. Et mon père le pensa toute sa vie.

Il était né en 1909 (quelques années avant sa sœur Denise), dans le foyer de Léonce Schwartz et de Marguerite Lévy-Valensi. Léonce, né à Paris, était originaire d’Alsace et son père, Isaïe, compositeur de musique, avait quitté le village de Westhoffen, berceau de la famille depuis le XVIe siècle, pour s’établir à Strasbourg. Sa femme Marguerite, ma grand-mère, venait de la communauté juive d’Alger qu’elle avait quittée avec sa mère et ses frères en 1898 lors des émeutes anti-juives qui accompagnèrent l’élection d’Édouard Drumont – l’auteur, très antisémite, de La France juive – comme député de la ville, en pleine affaire Dreyfus.

Robert, mon père, vit le jour à Paris, où il grandit, poursuivit sa scolarité au lycée Carnot, près de la rue de Tocqueville où ses parents habitaient. Très jeune, décidé à faire des affaires, il entra dans l’industrie de la parfumerie chez Lucien Lelong, marque célèbre d’avant-guerre, se maria une première fois avant de divorcer quelques mois plus tard. En 1939, mobilisé sur la ligne Maginot, il n’eut pas à combattre tant la défaite fut rapide, mais ne se résigna pas à passer la guerre dans Paris occupé.

Au cours de l’année 1940, ne parvenant pas à rejoindre l’Angleterre, il trouva une filière qui lui permit de partir pour New York d’où il s’engagea dans la France Libre, affecté aux services gaullistes au Moyen-Orient. J’aimais, enfant, qu’il me parle de sa vie durant la guerre et notamment de la façon dont Joseph Goebbels avait réclamé la mort pour le « juif Sinclair » qui parlait à la radio de la France Libre à Beyrouth.

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