Où sont passés les 18 milliards de dollars investis par la communauté internationale pour reconstruire l’Afghanistan, développer écoles et hôpitaux, éradiquer le trafic d’opium ? A l’heure où
l’offensive des taliban sur Kaboul se fait de plus en plus violente, Paul Moreira s’est rendu sur le terrain, dans des conditions difficiles, pour mener l’enquête.
Le résultat est à voir ce vendredi soir sur Canal+ en deuxième partie de soirée.
Alors que les donateurs américains de USAID clamaient à Paris, en juin 2008, qu’ils avaient construit 680 écoles dans tout le pays, Paul Moreira est parti vérifier cette affirmation à Kaboul. Sa
contre-enquête révèle que, par manque de place, les enfants suivent les cours dehors, dans un froid glacial. Huit ans après la chute de Kaboul, pas une
seule école n’a été construite dans la capitale par USAID. Il existe pourtant un secteur où la construction ne traîne pas. Celui des villas de luxe.
Dans un quartier de Kaboul, de véritables palais sont bâtis à la vitesse de l’éclair ; des maisons de 400 000 à 500 000 dollars pièce. Le quartier de Shirpour est un étrange “Dollaristan“ défendu
par des gardes privés et dont on a exproprié les pauvres qui y vivaient, à coups de bulldozer. C’est le premier scandale du gouvernement Karzai. L’investigation de Paul Moreira établit que ces
terrains du domaine public ont été spoliés par des seigneurs de guerre, anciens lieutenants du commandant Massoud. Alors que le portrait du martyr à l’intégrité morale intacte est placardé partout
dans la ville, ses proches ont fait main basse sur le pays et s’enrichissent de manière mystérieuse.
La presse américaine a émis des doutes sur le trafic d’héroïne au sein même du gouvernement. Paul Moreira montre que tout est fait pour ne rien savoir. Il rencontre le numéro un de la lutte
anti-corruption, qui a dû démissionner de son poste après la révélation de son incarcération aux États-Unis pour trafic d’héroïne. Enfin, l’argent de la reconstruction est pillé par millions. Il
enquête sur un hôpital de Kaboul qui tombe littéralement en ruine. La qualité des matériaux est en cause. L’ONG italienne qui a commandité les travaux ne s’émeut pas des images, alors que le
sous-traitant afghan est en fuite. Ce niveau de corruption, cette absence de sens du service public sont les premiers arguments utilisés par la propagande des taliban. Et ce regard sur l’état de
l’économie du pays recèle sans doute la clé pour comprendre la progression des insurgés, non seulement sur le terrain, mais dans le coeur et l’âme des Afghans.