1 Septembre 2010
Séries… Ton classement impitoyable ! saison 2009/2010.
Place 6 : LOST – Saison 6.
Classement 2008 / 2009 : 5ème.
Classement 2007 / 2008 : 10ème.
Par Alain Carrazé.
Diffusion sur ABC le mardi soir à 21 heures. Diffusé en France sur TF1.
Annulé après 6 saisons.
Avec Matthew Fox (Jack), Evangeline Lilly (Kate), Jorge Garcia (Hurley), Naveen Andrews (Sayid), Josh Holloway (Sawyer), Terry O’Quinn (Locke), Emilie de Ravin (Claire), Daniel Dae Kim (Jin), Yunjin Kim (Sun), Ken Leung (Miles), Henry Ian Cusick (Desmond), Michael Emerson (Ben), Nestor Carbonell (Richard), Jeff Fahey (Lapidus) …
Attention ! Indice Spoiler : 3/5
Quand Amaury m’a proposé de participer au classement du blog Tv News, j’ai spontanément répondu oui, et je n’ai pas tilté quand il m’a annoncé que mon texte porterait sur la dernière saison de « Lost ». Mettez ça sur la pression du moment, coincé entre Monte Carlo et le Comic Con France…le stress aidant, je n’ai pas réalisé dans quel guêpier je me fourrais. « Lost » ! la série la plus commentée sur le web ! Le final qui a déclenché la polémique, scindé en deux groupes les fans – les ravis et les révoltés. Et moi, envoyé au casse pipe…D’ici à ce qu’on me jette des pierres à la sortie d’Europe 1 ou en arrivant à Aubervilliers, y’a pas deux. Tant pis, j’assume. Et à charge de revanche, Amaury !
Pensant faire un bon mot, à la question : « pourquoi avez vous regardé « Lost », du début jusqu’à la fin ? »j’avais lancé, lors du débat que nous avions organisé sur la fin de Lost au Comic Con France « parce que j’y étais obligé ». En fait, la réponse n’était pas réellement une pirouette. Les séries feuilletonnantes m’ont toujours fasciné. De « Murder One » à « John Doe », en passant par « VR 5 », « Journeyman » et ma préférée, « Nowhere Man ». Bien sûr parce que je me passionne facilement pour ces longues énigmes dont on souhaiterait bien connaître les réponses tout en redoutant de les connaître –car cela marque alors la fin d’une série, mais aussi parce que jusqu’à une période récente, de telles séries à forte mythologie ne flirtaient pas avec l’audimat.
Et je trouve donc fascinant de voir comment créateurs et chaînes de télé tentent de convaincre le spectateur de se lancer dans un voyage d’un an au moins, d’être fidèle au-delà de tout faux pas, de les convaincre qu’on peut aussi prendre le train en marche. C’est en ricanant que je repense au bon de réduction pour l’achat de VHS vierges qui était proposés dans le TV Guide, au moment du lancement de « Murder One » : enregistrez les autres et regardez nous en live ! De même, les efforts considérables de séries comme « 24 » ou « Heroes » pour se rebooter chaque demi / saison, espérant ainsi séduire un public que l’on a perdu en route. Et « X Files » avait bien besoin de ses loners pour convaincre le grand public que la mythologie de la conspiration n’était pas au cœur de la série (hum hum…).
Je suis tout autant fasciné par cet exercice périlleux quand la promesse a du mal a être tenue, quand la montagne accouche d’une souris. C’était encore le cas de « Murder One » ou le meurtrier sortait tel un lapin du chapeau, quelques épisodes avant la fin. S’abattent alors les suspicions de foutage de gueule envers les scénaristes : et si rien n’avait été prévu ? Si tout cela était de l’esbroufe, inventé au fil des saisons et des semaines par des gens imbus d’eux mêmes, tellement « cools » et sûrs de leur génie qu’ils n’ont pas besoin de tout caler d’avance ? Aux USA, c’est « Twin Peaks » qui est tombé de son piédestal de série-phénomène, sous le coup de cette malédiction : le public, dérouté par les délires fantastico-bob-esque de Lynch, a enterré la série aussi vite qu’il l’avait encensé. Lost allait t’il tomber dans le même piège ?
La dernière saison de Lost est chargée de symbolisme télévisuel : elle marque encore plus clairement la fin de cette tendance au high-concept , aux séries à suivre à l’encombrante mythologie qui ont pullulé juste après son lancement : des « Invasion » a « Threshold », de « Reunion » à « Day Break ». Les précautions oratoires qui entourent le lancement de « The Event » en sont encore la preuve. Même à une époque de délinéarisation des contenus, du Tivo et d’Itunes, on a encore du mal a se plonger des heures durant dans une histoire qui risque de ne pas connaître un final à la hauteur. Clairement, « Lost » n’a pas tenu les promesses qu’implicitement, les créateurs avaient fait avec les spectateurs. On ne sait toujours pas « ce qu’est cet endroit », pour reprendre le dialogue de Dominic Monaghan qui clôturait le pilot. Une île avec un fort pouvoir électromagnétique qui fait remonter le temps, le tout centralisé dans une grotte avec son eau de jouvence. Point. Ceci étant dit, est-ce vraiment là tout l’intérêt de « Lost » ? A ce compte là, « Twin Peaks » n’était alors qu’un gros épisode d’ « Arabesque »…
« Lost » démarre sa dernière saison sur un concept stupéfiant : deux lignes temporelles, 2 réalité parallèle. Rien n’a changé et tout a changé. Cette idée délirante frappe autant que la révélation du flash-forward à la fin de la saison 3 dans « Through the Looking Glass », un des meilleurs épisodes de la série. Une telle audace narrative ne peut qu’être saluée. Cependant, cette double trame ne se poursuit pas en faveur de la saison : soit le flash-sideway paraît anecdotique, soit la vie sur l’ile apparaît comme « business as usual » : on s’engueule, on se sépare, on s’allie, on se retrouve…
Plongée en plein fantastique, la série parle maintenant de résurrection, de possession diabolique, de créatures multiforme (L’Homme en noir / Locke / Le monstre de fumée noire), et le point central de cette saison est l’affrontement des deux demi-dieux, Jacob et l’Homme en noir. Là encore, l’idée est délirante, le traitement souvent passionnant, mais cela n’enlève rien au fait que ces deux personnages cruciaux sortent, comme les lapins du chapeau déjà évoqué plus haut, à la fin de la saison précédente. Un peu comme « 24 », qui démarre une nouvelle intrigue à chaque saison, « Lost » fonctionne, au final, de la même façon. Les sauts dans le temps pour la saison 5 ; la guerre des Dieux pour la saison 6.
Mais là où «Lost » a toujours été très fort, c’est dans ses personnages, et cette dernière saison ne déroge pas à la règle ; Si les flash-sideways nous les montrent dans une version « what if » souvent réjouissante, la trame habituelle conclue, peu à peu, les parcours initiatiques engagés à leur arrivée sur l’île, et cela dans la plus parfaite cohérence. Le meilleur exemple restera le destin de Sun et Jin, arrivés séparés et déchirés, enfin réunis malgré les sauts temporels et unis jusque dans la mort. Ben, Hurley, Kate, et même Sawyer, leur parcours trouve aussi une conclusion cohérente et maîtrisée. De là à penser que c’est cet aspect de « Lost » qui comptait le plus pour les producteurs…
Arrive le final, une lutte Jack/Locke somme toute bien classique, un power switch sur off qui permet de terrasser le monstre, ainsi privé de ses pouvoirs, comme dans tout bon film de science fiction de séries B. Les quelques survivants s’enfuient. Hurley et Ben deviennent les gardiens de l’ile et Jack se sacrifie. Pourquoi pas.
Mais il restait à clôturer ces maudits flash-sideways qui, de bonne idée initiale, sont devenus un boulet… et on arrive à un purgatoire où se retrouvent tous les personnages, morts ou « à mourir », dans une ambiance religieuse des plus lourdes –sans mauvais jeu de mots- avec la sempiternelle lumière-blanche-au-fond-du-couloir. Ce qui avait suscité l’enthousiasme en début de saison flingue la série toute entière, en laissant la marque dorénavant indélébile d’une bondieuserie typiquement américaine. La série est tellement plombée que certains ont cru comprendre que c’était là, le vrai mystère de Lost : ils étaient tous morts ! Bien sûr que non, mais le mal est fait. Un final émouvant, certes, mais extrêmement réducteur.
Que reste t’il de « Lost » ? la preuve que les scénaristes ont avancé au fil des années, sans trop avoir les clefs de toutes les questions qu’ils lançaient. A ce titre, il est intéressant de mentionner que J.J.Abrams m’avait confié, il y a 2 ans, que le mystère central de la série tel qu’il l’avait initialement imaginé n’était plus celui que Cuse et Lindeloff suivaient à présent… Preuve aussi de la puissance d’Internet qui a permis aux fans de créer leur propre univers à partir de minuscules détails que l’on croyait laissés comme des indices et qui ont fait buzzer des années durant : le logo sur le requin , la Dharma initiative, les hiéroglyphes sur le compteur… la preuve aussi que Lost reposait avant tout sur ses personnages, attachants, faillibles, à l’opposé des clichés et stéréotypes habituels, et qui ont clairement possédé une réelle grandeur. La preuve enfin que, si cette fin ne rentrera pas au panthéon des grandes fins de séries, aux côtés de celles du « Prisonnier », de « Battlestar Galactica » ou de « The Shield », la série, elle, aura marqué son époque et un public.
Alain Carrazé.
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